Dans mes cours, j’observe parfois mes élèves mettre l’accent sur les asanas (postures), au détriment des autres pratiques, telles que la respiration ou la concentration.

Ces dernières sont parfois vues comme totalement accessoires, pour ne pas dire inutiles. 

Peut-être parce que nous accordons plus de temps pour les postures durant les séances? ou alors parce que le yoga est souvent représenté par des personnes très très souples qui se tortilonnent dans toutes sortes de positions?

Quoiqu’il en soit, je répète très souvent que les asanas ne sont que la partie visible de l’iceberg.

Et oui, le yoga est un tout! pour reprendre l’expression d’Hélèna Volet, directrice de l’Ecole Supérieure de Yogathérapie, « le yoga est une pratique personnelle pluridisciplinaire ». Elle ne peut donc se réduire à l’exécution de quelques postures. 

Comme je l’ai déjà évoqué dans de précédents articles, le yoga est composé de quatre voies:

  • le Karma Yoga: le yoga de l’action. En particulier du service désintéressé. Les karma yogis vont oeuvrer au bien d’autrui;
  • le Bhakti Yoga: le yoga de la dévotion. Comprenez le yoga qui va vous mener sur le chemin de la spiritualité (ici la dévotion n’est pas synonyme de bigoterie). En pratique, cela implique la récitation ou le chant de mantras entre autres;
  • le Jnana Yoga: le yoga de la connaissance. Cette voie touche au coeur de la philosophie de non-dualité (Vedanta), de la conscience du Soi Universel. Il s’agit par ailleurs de l’étude des textes fondateurs tels que la Bhagavad Gita;
  • le Raja Yoga: la voie royale du yoga. C’est la voie « technique » si j’ose dire.

Elle se compose des Ashtanga, soit des 8 branches du yoga:

  1. Les Yama: ce sont les principes éthiques vis-à-vis des autres, dont en particulier, Ahimsa: la non-violence;
  2. Les Niyama: les principes éthiques vis-à-vis de soi-même. Par exemple: l’austérité, le contentement (voir l’article du 20 février 2019 pour plus de détails sur les Yama et Niyama)
  3. Le Pranayama: soit les techniques de maîtrise du souffle;
  4. Les Asana: le travail postural, qui libère les tensions physiques afin de se libérer des tensions psychiques;
  5. Pratyahara: la pratique du retrait des 5 sens;
  6. Dharana: la concentration;
  7. Dhyana: la médiation;
  8. Samadhi: l’accès à la conscience du Soi Universel / Atman

Mais ces branches ont un ordre à respecter: il s’agit en premier lieu de chercher à mener une vie en accord avec les Yama et Niyama avant de commencer à apprendre à maitriser son souffle. C’est seulement ensuite que le travail postural peut s’amorcer. Mais il n’est qu’un passage parmi d’autres pour accéder à Dhyana et ultimement à Samadhi.

A cela se rajoute les Kryias, que sont les techniques de purification corporelle, ainsi que le soin apporté à son alimentation. 

Il apparait ici clairement que les postures ne sont pas la part la plus importante, même si elles font partie intégrante de la pratique. Elles n’arrivent qu’en quatrième position dans l’ordre des 8 branches, et ne sont jamais un but en soit, mais plutôt un instrument à notre disposition.

De ce fait, une pratique des asanas qui ne respecte pas notre propre limite, c’est Himsa: une violence faite à soi-même!

De même, une pratique basée uniquement sur l’exécution « technique » des asanas, sans prendre en compte la dimension contemplative (immobilité des postures, souffle, intériorité) revient à pratiquer du stretching, de la gym, … bref, de l’exercice physique. Ce n’est donc PAS DU YOGA!

Je tiens à préciser ici qu’il ne s’agit pas d’une conception personnelle, mais de la définition universelle et intemporelle du yoga.

En soi, rien de mal à pratiquer du stretching ou autre activité physique, bien au contraire. Mais il fait être très au clair sur le fait que les bénéfices qui en découlent ne seront pas les mêmes. 

Pour autant, il n’est pas nécessaire de vivre comme un « ascète élastique ». Il suffit juste d’envisager le yoga dans sa globalité.

Cela implique alors de se positionner:

  • est-ce ok pour moi de chercher à tenir la posture dans une parfaite immobilité?
  • est-ce ok pour moi de rester dans le silence, à me concentrer pour une, trois, dix minutes ou plus?
  • est-ce ok pour moi d’apprendre à maitriser mon souffle?
  • est-ce ok pour moi de lâcher-prise et de m’abandonner complètement à ce qui advient?

Si la réponse à toutes ces questions est oui, alors vous avez déjà un pied sur le chemin du yoga.

Sachant cela, il s’agit de faire soi-même l’expérience de ces différentes pratiques et d’aller explorer cet espace que le yoga ouvre en nous, car comme le disait Swami Sivananda: 

« une once de pratique vaut mieux qu’une tonne de théorie ».

Alors je vous invite pour cette période de renouveau à garder à l’esprit que le yoga est une boule à facettes et que chacune de celles-ci contribue à éclairer notre chemin. 

Namasté…

… et Joyeuses fêtes de Pâques 🌷🐣🌷